La revue Europe avait publié en 2004 un numéro consacré au thème séduisant : le romantisme révolutionnaire. S’agit-il d’un ramassis de causes désespérés, de rêves envolés, d’illusions perdues ? Cette génération de 1830 a-t-elle véritablement servi la cause d'”Un socialisme poétique, donc, qui viserait le libre épanouissement des sens dans une collectivité régénérée — « l’heureuse union de la culture supérieure avec la nature libre » (Kant) écrivaient dans le premier chapitre de la revue les auteurs, Michael Löwy et Max Blechman. A quel jeu était promis ce romantisme ? Car c’est bien de jeu dont il s’agit. “À la fin de la quinzième des Lettres sur l’éducation esthétique de l’homme, Schiller énonce un paradoxe et fait une promesse. Il affirme que « l’homme n’est entièrement homme que lorsqu’il joue ». Et, à ceux qui penseraient qu’il plaisante, il annonce que ce paradoxe est capable de « soutenir l’édifice entier de l’art esthétique et de l’art encore plus difficile de vivre ». Il affirme donc qu’il existe une forme spécifique d’expérience sensorielle, l’expérience du jeu esthétique, et que cette expérience bien comprise porte la promesse d’un nouveau monde de l’art et d’un nouveau monde vécu.” écrit Jacques Rancière au chapitre 2.
Le siècle des Lumières n’a pas fini de nous révéler sa puissance dans la pensée de l’agir, affranchie des contingences économiques et matérialistes. C’est sur ce XVIIIe siècle florissant et réjoui que repose l’expérience romantique. Nous aurons beau jeu au XXIe siècle, de rêver d’insoumission ou d’indignation. Les appétits de réjouissances sont écrasés par le poids des convenances.
Le Romantisme révolutionnaire, Revue Europe, avril 2004, en ligne sur artelittera.com